Riley Dawson
butterflies : 154
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| Sujet: keep on running | ez Sam 3 Fév - 0:16 | |
| Les deux heures les plus longues de toute ma vie, qu'elle se dit Riley, assise sur le comptoir près de la caisse enregistreuse du Dany's. La brune fixe l'horloge, étonnée de voir que seulement deux minutes et trente-sept secondes se sont écoulées depuis la dernière fois que ses yeux s'y sont posées. Ses paupières sont lourdes, comme hypnotisées par le jazz grésillant qui s'échappe du vieux transistor que le cuistot refuse obstinément de changer ou de réparer. Elle a tenté d'actualiser ses feeds Instagram, Facebook, Snapchat et compagnie tant de fois que la batterie elle-même a abandonné et lâché prise, fuck SH et son réseau merdique ! Arrivée à court de solutions pour s'occuper, l'ennui mortel, que dis-je, l'emmerdement abyssal menacent de la dévorer. Ry ne sait vraiment pas pourquoi ses patrons s'obstinent à ouvrir tous les jours de la semaine, sans interruption entre 10AM et 10PM. C'était pas comme si la ville était peuplée de gros lards qui cherchaient à ingurgiter un énorme plat de pâtes à toute heure. C'est pas comme si la ville était peuplée tout court en fait, on est à Star Hollows, pas à New York, merde. Ça allait entre midi et deux, un soir sur deux et éventuellement le week-end. Les familles et les couples du coin y avaient leurs habitudes, les lasagnes de chez Dany's étaient connues pour être légendaires mais le reste du temps, niet, nada, vide de chez vide. C'était le cuistot, elle ou un autre serveur pour tenir la salle et puis c'est tout. Tic, toc. Tic, toc. Tic... Toc. L'horloge afficha enfin les seize heures pile tant attendues et il ne lui en fallut pas plus pour retirer son uniforme d'un geste, claquer une bise au cuistot, piquer un doggy bag dans le frigo pour son repas du soir et sortir en trombe sur le parking. Elle rejoignit sa voiture, enfin la voiture qu'elle avait empruntée (pour ne pas dire voler) à sa mère, une vieille Ford Capri rouge capricieuse qui démarrait une fois sur quatre et tombait en panne explicitement quand vous ne vouliez pas tomber en panne. Lucky day, aujourd'hui, elle démarre sans broncher, alors Riley se met à rouler comme une dératée jusque chez elle, empruntant la route la plus longue et les rues les plus chiantes parce que c'est drôle. Mais arrivée en bas de son bloc, elle réalise qu'elle n'a aucunement envie de rentrer chez elle. Cinq longues minutes se passent avant que la jeune femme ne trouve enfin où aller. Elle traverse à nouveau la ville et vient se garer en bas d'un immeuble qu'elle ne connaît que trop bien désormais. La tête posée dans l’entrebâillement de la fenêtre abaissée, la voilà qui klaxonne comme une barge. Pas un texto, pas un appel, non, un bon vieux klaxon pour attirer l'attention de celui qu'elle attend, elle ne sait même pas s'il est chez lui mais elle klaxonne quand même. Faut dire qu'en plus, l'avertisseur de la vieille bagnole fait un bruit reconnaissable entre tous. Une sorte de couinement aigu qui vous ir-ri-te le tympan. "C'est pas trop tôt", qu'elle lâche, lorsque la porte du bas s'ouvre enfin, laissant apparaître une silhouette familière. "J't'ai ramené à manger, t'as faim ?" Cela faisait bien deux ou trois semaines qu'ils ne s'étaient pas vu ou même donné de nouvelles. Peut-être qu'un reste de lasagnes saurait l'amadouer, right ? |
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